Le répertoire et les actus de la bande dessinée africaine

Articles

Analyse
Madagascar

La BD à Madagascar : introduction


Christophe Cassiau-Haurie


C'est en 1961, qu'apparaît la première BD, Ny Ombalahibemaso de Jean Ramamonjisoa d'après un ouvrage du révérend père Rahajarizafy. Elle relatait la vie du fondateur de la nation, Andrianampoinimerina. Les années suivantes donnent lieu à quelques balbutiements où l'on peut remarquer le Français Michel Faure (auteur du premier album cartonné en 1975), Richard Rabesandratana, Christian Razafindrakoto ainsi que Xhy et M'aa, couple d'artistes qui seront publiés dans Charlie Hebdo en 1978. La période faste de la BD malgache se situe dans les années 80, à l'issue de la "malgachisation" (1972-1984). Elle se caractérise par une prolifération de revues et de séries, phénomène unique en Afrique. En 1980 est fondé Horaka (la rizière) par Ranaivo Delano et Richard Rabesandratana. Cet éditeur publiera avec succès de nombreuses séries cultes (Lietnà Ralahy, Inspecteur Max, Raleva et Danz) et des BD pédagogiques. Encadrés par Arthur Rakotoniaina, plusieurs dessinateurs y font leur début. En 1982, suite à une scission, Ranaivo Delano ira créer la revue Eh ! qui rencontrera beaucoup de succès. Quelques années après, Rakotoniaina l'imitera en créant les éditions Danz, où de jeunes auteurs pourront laisser éclater leur inspiration issue de la culture des comic-books italiens et du cinéma populaire : aventure, karaté, western, horreur… En 1985, l'apparition des éditions Tsileondrika marque une étape importante en terme de professionnalisation du milieu. Cet éditeur assurera dix publications mensuelles dont la série à succès Koditra et son héros Bobel (influencée par des films comme Evil dead ou Freddy), illustrée principalement par Rakotosolofo Gilbert, et ses titres dérivés : Koditra spécial, Kalanoro mais aussi Bery, Siringo (séries touchant au western), Ninja (arts martiaux). 28 structures éditoriales éditant en permanence une trentaine de publications mensuelles sont recensées en 1989 dont une majorité en malgache. En 1984, paraît Aventures dans l'océan indien, premier album financé par la coopération française. En 1986, Richard Rabesandratana et Ndrematoa participent au Festival d'Angoulême. A partir de 1991, la crise économique et politique entraîne un déclin : le pouvoir d'achat s'effondre et la pratique de la "location" des livres ruine les éditeurs. Ceux-ci ferment leurs portes. La production se raréfie et devient quasi-uniquement le résultat de travaux de commandes d'ONG ou d'organismes de coopération internationale. Début 2000, la BD malgache se relance grâce à l'appui du Centre culturel Albert Camus (CCAC) qui réalise avec l'association Mada Bd, deux albums collectifs, "Sary gasy" et "Ny lasa no miantoka ny ho avy", présentés à Angoulême. De nouveaux noms apparaissent, comme Dwa (Pions - 2004) mais aussi Rado (Les nuits magiques - 2005) et Ramafa. En parallèle, Elisé Ranarivelo, caricaturiste de L'express, publie plusieurs recueils ainsi qu'un mini-album en 2009, La petite Péta. Tiana Ratavohery lance en 2000 l'hebdomadaire Ngah, qui atteint un tirage de 2 000 exemplaires. En 2005, le CCAC lance le mois de la BD "Gasy bulles". Cependant, le nombre d'albums publiés n'a plus rien à voir avec les années 80 et reste sous assistance respiratoire, dépendante des coopérations occidentales ou des ONG. En Europe, quelques artistes malgaches arrivent à publier des histoires dans les albums collectifs : A l'ombre du baobab (2002), Afrobulles n°1 et 2, Africa comics 2002, Africa comics 2003, BD Africa (2005), Africa comics 2007-2008. En parallèle, les éditions Sary92, fondées en France par Luc Razakarivony publient 4 albums se déroulant sur l'île rouge. Mais, de fait, aucun Malgache n'arrive à s'imposer en Europe, hormis la jeune Jenny, auteur de la série manga Pink Diary (7 volumes), ainsi que d'une autre série dont le deuxième volume est paru en février 2010, Mathilde. Elle devrait être suivie par le duo Dwa et Pov qui devraient publier un album chez l'éditeur réunionnais Des bulles dans l'océan. Malgré cela, au pays, l'organisation d'expositions régulières, ainsi que les quelques ouvrages publiés (en 2010, on peut noter la parution de Zana malata, Tata et Benify, Miaramasoandro pour la collection Fataper Mitsitsy) démontre que le réservoir des talents ne cesse de se renouveler. La BD malgache a encore de l'avenir…





Licence Creative Commons
Convention avec Wikiafrica / Wikipedia : les contenus d'Africultures sont librement partagés selon la licence Creative commons BY-SA 3.0 FR.
Cependant, les textes signés par des auteurs sont soumis à copyright : ils peuvent être cités avec indication de la source mais ne peuvent être reproduits.