FSM 2013 – Étape 1 : Paris

Portes closes à Solferino

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À l’initiative de Coordination internationale des sans-papiers, une caravane d’une dizaine de [sans-papiers et de militants] se rend au Forum social de Tunis en passant par la France, la Belgique et l’Italie. Deux journalistes d’Africultures les accompagnent dans leur périple à travers l’Europe pour atteindre les côtes tunisiennes puis revenir en France.

Mercredi 20 mars 2013, 18 heures, le comité d’accueil de la caravane des sans-papiers s’active à quelques mètres du siège du Parti socialiste dans le 7e arrondissement de Paris. Les militants arrivent au compte-gouttes autour de la bouche de métro Solferino entre les immeubles haussmanniens du boulevard Saint-Germain. Si les organisateurs souhaitaient initialement se rassembler devant les instances dirigeantes du parti, ils ont opté pour cette alternative, faute d’autorisation. Une dizaine de minutes plus tard, les militants sont rejoints par plusieurs cars de CRS stationnés en file indienne face à eux.
La sono est déjà en place et les premiers arrivés déploient rapidement une banderole arborant le slogan « Faut-il mourir pour des papiers ? », derrière laquelle ils se postent. Les drapeaux rouges du Nouveau parti anticapitaliste flottent aux côtés des drapeaux jaunes de l’association [Droits Devant].
45 minutes plus tard, le car blanc et bleu ciel arrive enfin et s’arrête sur le boulevard pour faire descendre la trentaine de militants et de sans-papiers, acclamés par leurs soutiens. Les passants se retournent pour assister dans leur sillage à des scènes d’embrassades sur le son des djembés et des slogans scandés au mégaphone. Mariage pour tous, papiers pour tous, c’est ça l’égalité des droits ou encore Première, deuxième, troisième génération, on s’en fout, on est chez nous. Pendant que les derniers passagers sortent du car, les autres déchargent rapidement les soutes et entassent les sacs et les cartons sur le trottoir.
Partis lundi 18 mars de Paris pour rejoindre Lille, les militants se sont rendus le jour suivant à Bruxelles pour une marche ralliant l’Office des migrations internationales au Conseil de l’Europe. La caravane qui devait initialement partir de Berlin a finalement fait son premier stop à Lille pour rappeler à Martine Aubry, maire de l’ancienne cité ouvrière, qu’en 2011 elle avait promis à la coordination des sans-papiers de les recevoir. En effet, lors du Forum social de Dakar la délégation de la coordination des sans-papiers avait rencontré par hasard sur l’île de Gorée, celle qui était à l’époque première secrétaire du parti socialiste. Cette promesse était jusqu’à ce jour restée sans suite. « Même si Martine Aubry ne nous a pas reçus en personne, un membre de son cabinet et un élu nous ont assuré qu’ils nous soutiendraient en cas de problème », rapporte Simone Rivolier, présidente de la Fédération des associations de solidarité avec les travailleurs immigrés (Fasti) qui accompagne la caravane jusqu’à Tunis.
À Lille comme à Paris, les sans-papiers saisissent les occasions pour manifester leur déception et leur mécontentement quant à la politique de régularisation menée par le Parti socialiste au pouvoir depuis le 6 mai 2012. Vers 20 heures, c’est sans avoir croisé de représentants du parti que les caravaniers se dirigent vers le gymnase des Invalides où ils passeront la nuit avant de commencer leur périple vers Tunis au petit matin. Le lendemain lorsqu’un membre du cabinet de Bertrand Delanoë se rend dans ce complexe sportif mis à disposition par la Mairie, il est surpris que Solferino pratique la politique des portes closes à l’instar des institutions européennes. La confusion règne. « Ah bon ? », nous répondra-t-il simplement avant de s’enquérir de la suite du périple de nos compagnons de voyage : « Donnez des nouvelles ».
Au détour de la conversation, le conseiller confirmera que malgré son silence, le ministère de l’Intérieur est bien au courant de la démarche. Il laissera échapper cette phrase : « Ce n’est pas les marcheurs qui m’interrogent, c’est le ministère de l’Intérieur ».
Qu’importe, la machine est lancée et les trente-et-un caravaniers que nous suivons pour Africultures prennent le chemin de Valence, la première étape du trajet. Nous quittons le gymnase à l’image d’une colonie de vacances, deux par deux, beaucoup portent le même gilet fluo au dos duquel on peut lire pas de papiers, pas de frontière. L’un des caravaniers s’adresse aux appariteurs du gymnase : « Merci ! Vive la France, vive la République », lance-t-il en riant.

Retrouver tout le périple dans [le zoom] consacré à la caravane des sans-papiers.///Article N° : 11411

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