entretien d’Olivier Barlet avec Adama Kouyaté, acteur malien

Namur, octobre 1999
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Quel est votre parcours ?
J’ai passé la majeure partie de ma vie en France. Je ne suis venu au théâtre et au cinéma qu’il y a une quinzaine d’années. J’ai abandonné l’enseignement que j’avais abordé après une licence d’arts plastiques pour me concentrer à la mosaïque. Je fais des fresques monumentales. En dehors de la figuration, ma carrière a débuté au cinéma avec Le Cri du cœur d’Idrissa Ouedraogo. Je joue facilement les rôles de vieil africain qui sait parler français ! Puis vinrent Po di Sangui, Black Dju, Keïta, Saraka Bô (ou mes toiles décoraient le bureau du commissaire), des clips, des défilés de mode…
Vous n’avez pas peur d’être cloisonné dans un type de rôle ?
Cela ne me gêne pas de jouer les sorciers ou les chefs de village. Je ne peux pas jouer n’importe quoi, comme un méchant policier ou certaines scènes de nudité ou amoureuses. Je suis dans ma peau et mes personnages doivent correspondre à ma personnalité.
Faites-vous une différence entre un film africain et un film européen ?
Aucune, si la direction d’acteur est bien élaborée. Dans les films africains, on ne me dirige pas et en général, ça convient. Dans les européens, il y a beaucoup plus de recherche sur le jeu.
N’est-ce pas que le cinéaste africain s’adresse davantage à un personnage qu’à un acteur ?
La direction d’acteurs est différente : l’Européen peut dénaturer la personnalité du comédien en étant plus directif.
Quels sont les rôles qui vous ont le plus marqué ?
Keïta l’héritage du griot car je suis moi-même mandingue et griot, et Po di Sangui, bien qu’il ait fallu que je joue en créole bissau-guinéen, ce qui n’était pas simple au début.
Le cinéma et le théâtre sont-ils fondamentalement différents pour vous en tant qu’acteur ?
Certains metteurs en scène de théâtre laissent un champ d’action large comme on peut le rencontrer au cinéma, mais sur la scène, c’est beaucoup plus élaboré. Je crois que je me sens plus à l’aise au théâtre, à condition qu’on nous laisse suffisamment de temps pour préparer, ce qui n’est pas toujours le cas !
Vous avez joué un rôle d’Aborigène. Cela ne vous gêne pas, vous Malien, d’être pris pour un tel rôle ?
Non. Les Aborigènes sont très noirs de peau et ont les cheveux blancs quand ils sont vieux, comme moi ! Cependant, il est difficile pour les Noirs d’avoir des rôles intéressants : je jouerais volontiers un professeur d’université, un médecin, un avocat etc. mais ces rôles sont rarement confiés aux Noirs ! Les Noirs américains se sont battus pour être présents : à nous de le faire aussi !

///Article N° : 2469

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